Alors que les lycéens descendent dans la rue, et viennent enfler les cortèges des manifestants, leurs ainés semblent moins motivés à s’investir dans cette réforme des retraites. Etudiants et jeunes diplômés, plus résignés, plus pessimistes que leurs cadets. Et si finalement ce n’était que le reflet des caractères de personnages télé qui les ont vus grandir ? Dis-moi ce que tu regardais à la télé et je te dirai qui tu es !
Les séries ne sont-elles que le reflet d’une époque ou contribuent-elles à créer l’air du temps ? Éternelle question de l’œuf et de la poule. Indéniablement, les lycéens d’hier et ceux d’aujourd’hui n’ont pas été bercés par les mêmes séries. En 10 ans, les séries ont changé, les ados aussi. Rien à voir entre les amis de Gossip Girl et la bande de Dawson’s Creek, la série diffusée à partir de 1999 en France et qui a vu grandir pendant 127 épisodes des jeunes qui ont 25 ans aujourd’hui.
Des attitudes et des comportements qui se retrouvent dans la « vraie » vie. Quand certains rêvent de l’agitation de New-York, comme dans Gossip Girl, d’autres s’évadaient dans la paisible ville de province de Capside. Et il suffit d’assister à une sortie de lycée aujourd’hui pour s’apercevoir qu’on est plus proche du style vestimentaire des fashionnistas que des ados ordinaires de Dawson. Talons, jupes courtes, sacs de marques, bien loin des jeans et chemises Creeks. Et il ne s’agit pas que de mode ou d’environnement. Les caractères et les actes n’ont rien à voir non plus. Pourtant, dans les deux séries, les personnages fictifs grandissent et sont confrontés aux mêmes situations que les adolescents de la vie réelle. À quelques détails près… qui font toute la différence, et qui marquent peut-être aussi les différences dans l’éducation des adultes de demain.
Des petits riens qui font beaucoup
L’argent. Étonnant de voir comment l’argent est devenu une question décomplexée entre les deux séries. Alors que dans Dawson, la question n’est abordée que rarement, dans Gossip Girl, il n’est pas problématique, mais présente partout. Jeunesse dorée vivant dans l’Upper East Side, les fils et filles à papa ne manquent de rien, vont dans des lycées privés dans des voitures avec chauffeurs. Le statut social semble de fait primordial, les soirées sont privées, et il s’agit d’en être ou pas.
Le sexe. Dans Dawson, on parle de sexe, dans Gossip Girl on le fait. Que de discussions, que de doutes, que de peurs et d’épisodes avant que Joey ne passe le cap. La question est une question primordiale de savoir s’il faut ou non avoir des relations sexuelles, alors que la question ne se pose même plus aujourd’hui dans Gossip Girl. Le sexe est un jeu assumé, l’ordre moral moins fort qu’à l’époque de Dawson, comme pour l’argent, on l’assume et on en profite. Pourtant, c’est avec le personnage de Jack dans Dawson que la question de l’homosexualité est abordée, question qui n’existe pas dans le monde de la jeunesse dorée new-yorkaise.
L’insouciance. Champions toute catégorie dans l’art de réfléchir sur sa vie plutôt que de la vivre, les palabres entre Dawson, Joey, Pacey et Jen, n’ont plus rien du langage adolescent. Dans un langage plus proche de celui de cinquantenaires aigris que de celui de jeunes de 16 ans ; amitié, amour, problèmes d’adultes tout est analysé, disséqué, réfléchi. Peu de place à l’imprévu, il s’agit de réfléchir avant d’agir, prudence est le maître mot. Bien loin de l’insouciance de l’adolescence en somme… Et bien loin des questions soulevées par Gossip Girl où l’important problème est de savoir ce que l’on dit et ce que l’on pense de toi. À l’heure d’Internet, et des smartphones, c’est en direct que les commérages agissent sur la vie des personnages. Plus de place à la gentillesse dégoulinante de Dawson, ici, tous les coups sont permis, surtout les plus tordus entre des personnages plus confiants en eux et en l’avenir les uns que les autres.
À chaque époque ses séries, à chaque époque ses problèmes en somme. Les adolescents d’aujourd’hui seront peut-être plus confiants, moins passifs que leurs aînés. Moins naïfs et moins gentils peut-être aussi. Mais heureusement, parfois la réalité reprend ses droits sur la fiction.