Comme beaucoup de produits exigeants, les anchois sont souvent mal aimés, ou plutôt, il semble très difficile de faire autrement que de les adorer, ou de les détester.
Un emblème de l’Europe de la table ?
Ce petit poisson est un produit bien de chez nous, je veux dire européen ! Qui plus est, l’été est sa saison, celle où avec son banc de bro’ il remonte des fonds et vient reluquer les jolies filles sur la plage. Entre le Golfe de Gascogne ou celui du Lion, son cœur balance. En fait, on en trouve aussi en Mer du Nord et en Baltique, mais nos amis Scandinaves lui ont depuis bien longtemps préféré le hareng. Ces gens… Bon, certes, comme pour tout produit préparé l’été, l’idéal est de le consommer l’hiver ou le printemps suivant, mais passons.
Plus que nos récemment infortunés fratelli d’Italia et que nous-mêmes, les Espagnols en raffolent et en ont presque le monopole de la pêche en Atlantique. Il n’y a qu’à voir ceux que l’on sert frits entiers en tapas sur les plages de Malaga. Cependant, ce ne sont souvent que les filets que l’on mange, levés et marinés et vendus dans ces petits pots si caractéristiques. Le goût de l’anchois que nous connaissons est en fait le produit d’une ancienne technique de sa conservation par salaison
L’anchois estival
L’anchois se consomme d’abord pour sa chair. Il doit alors être préparé frais, dégusté avec un simple filet d’huile d’olive, avec une salade de pommes de terre, mariné au citron avec un peu de persil, dans sa niçoise, en vinaigrette, en feuilleté ou encore à l’Andalouse juste sauté à la poêle avec des tomates, de l’ail et du persil. L’anchois se marie particulièrement bien avec les légumes méditerranéens, ou alors ce sont là encore nos habitudes qui ont fini par nous en convaincre.
Cette chair comme une autre peut aussi faire office de farce. Le grand classique du genre est sétois. C’est celui de grosses olives vertes farcies que l’on grignote à l’apéritif ou que l’on peut ajouter à une viande en sauce pour la relever. Mélangés avec un caviar d’aubergines, il viennent aussi garnir la coque du cucurbitacée qui a été réservée.
L’anchois, une épice ?
Or, la spécificité de cette chair est que son utilisation en fait une véritable épice. Frottée contre ou piquée dans une épaule ou un rôti d’agneau comme le serait l’ail : voilà qu’elle relève le plat. À bien des égards, les anchois donnent à l’agneau un goût de prés salés parfois exotique pour la Méditerranée. Anchois, ail et thym voilà une base d’une marinade, ou d’une petite sauce pour accompagner votre entrecôte. Ail et anchois, c’est aussi tout ce qui fait cette sauce napolitaine qu’est la puttanesca, servie d’abord dans les bordels du port de la ville et aujourd’hui dans les plus grands restaurants. Bien entendu, la patrie de la pizza ne s’est pas faite priée pour les ajouter avec quelques câpres et olives noires. Mais l’anchois peut aussi tout simplement se déguster en bruschetta.
Enfin, je ne saurais vous épargner quelques mots sur l’anchoyade, ma préférence allant à celle de Sorrente, mais que la Provence ne m’en veuille pas. Ici aussi, la base est on ne peut plus simple. Filets d’anchois levés et hachés finement, huile d’olive, ail et citron, faites la au mortier et vous voilà avec une pâte amère et délicieuse que vous pouvez déguster pour elle-même sur un simple croûton de pain grillé ou à la Provençale en y trempant des légumes crus avant de les faire revenir à la poêle.