Inspiré d’une histoire vraie (même si on s’en fout un peu), le dernier film de Cameron Crowe raconte l’histoire d’un veuf qui décide de s’acheter un zoo. Ca aurait pu être insupportablement sirupeux, c’est en fait une petite merveille d’ingénuité.
Le bonheur à tout prix
Pour défendre un film aussi sentimental que We Bought A Zoo (pardonnez-moi si je préfère le titre original à la traduction sans charme du distributeur français), il serait facile de brandir l’argument selon lequel il faudrait être dépourvu de cœur pour oser parler de niaiserie indigeste. Le mythe de la deuxième chance est un thème classique et archi-rebattu qui s’applique d’ailleurs à la plupart des films de Cameron Crowe. C’est l’éternel rêve américain, que le cinéma hollywoodien a toujours adoré transcender dans son élan idéaliste. Mais contrairement aux grandes envolées patriotiques, la question de l’humain a toujours intéressé Cameron Crowe. De Say Anything au merveilleux Almost Famous, sans oublier Jerry Maguire, tous ses personnages sont d’ailleurs confrontés à un choix crucial pour retrouver le bonheur en vivant une drôle d’aventure sentimentale. Tout le talent précieux de Cameron Crowe réside dans cette étrange subtilité pour insuffler une certaine vérité sentimentale à l’intérieur de scénarios archétypaux et hyper-balisés qui semblent guidés par de gros sabots.
Des kilogrammes de sentiments
Malgré quelques petites fautes de goût (dont une musique omniprésente) qui n’entachent pas le plaisir, We Bought A Zoo réussit à maintenir jusqu’à sa fin d’ailleurs assez bouleversante (mais on n’en dira pas plus), un certain équilibre dans sa manière d’épouser l’enjeu du personnage principal, ce veuf admirablement interprété par Matt Damon. Quand l’une des employées du zoo (Scarlett Johansson, naturellement charmante) lui demande quelle idée saugrenue lui a pris d’acheter un zoo, la réponse est imparable « Why not ? » Ce qui intéresse Cameron Crowe, c’est de filmer sa détermination, peut-être un peu inconsciente mais courageuse, d’aller jusqu’au bout de son projet, dans l’unique espoir de surmonter le deuil et pour mieux aider sa famille. Et peu importe si chaque tuile financière se résout en deux secondes, le film fonctionne jusqu’au bout dans la cohérence de son programme moral et sentimental.
Paul Cézanne disait » Monet, ce n’est qu’un œil, mais quel œil ! » Je vais donc oser la comparaison : Cameron Crowe, ce n’est qu’un cœur, mais quel cœur !