Que vous soyez satisfait, déçu ou indifférent aux résultats des Oscars 2012, Jean Dujardin est partout. Il est même à l’affiche des Infidèles. Mais Zoom Out va vous surprendre encore une fois et vous propose plutôt Oslo, 31 Août. C’est Norvégien, c’est triste, c’est froid et méconnu. Mais c’est vraiment bien.
Le 31 août marque la fin de l’été en Norvège, les beaux jours s’effacent et laissent place à un court automne et à un très long hiver. Oslo 31 août est une invitation lancée au spectateur à partager cette journée avec Anders, un junkie trentenaire qui s’efforce de terminer sa cure de désintoxication. À l’occasion d’un entretien d’embauche qu’il doit passer à Oslo, Anders est autorisé à sortir dans la ville, c’est peut être l’occasion de renouer avec un passé lointain, des amis, sa famille et des amours perdus de vue.
Un cinéma influencé par la « nouvelle vague »
À l’image du cinéma scandinave contemporain, je pense notamment à Morse, ce deuxième film de Joachim Trier est à la fois moderne (excellente bande son électro) et référencé. Cette quête de soi qui suit la réinsertion d’un drogué est une relecture du roman Feu Follet de Pierre Drieu La Rochelle (déjà adapté à l’écran par Louis Malle en 1963). L’esthétique sobre et cette caméra-œil qui suit sur une journée les errances physiques et mentales de cet être profondément seul rappellent l’esprit de la nouvelle vague », notamment le cinéma de Robert Bresson ou encore Cléo de 5 à 7 d’Agnès Varda.
Joachim Trier maitrise et partage ce souffle de liberté qui planait sur le cinéma français des années 60 mais il y a ajoute un spleen onirique nordique qui vous transperce. Contrairement à Requiem for a dream,où le parti pris choc et l’esthétique MTV sont très ancrés dans une époque post 2000. Le traitement hyper réaliste, naturaliste et sans artifices de Oslo, 31 Août apporte quelque chose de beaucoup plus intemporel.
Cette démonstration en filigrane sur la capacité de toute addiction (on parle là de drogues dures) à vous briser et à vous isoler du monde est d’autant plus forte qu’elle semble terriblement personnelle et sincère. Paumé et désespéré, Anders Danielsen Lie donne une vraie crédibilité à un personnage de toxicomane qui aurait facilement pu sombrer dans le chiant et le pathos.
La solitude de l’âge adulte
On ne s’interroge jamais sur les raisons qui ont amené Anders à se droguer. Apparemment, il n’y en pas. Anders a 30 ans, il est comme tout le monde. Il cherche sa place, il appartient à la classe moyenne et il a des amis qui aujourd’hui se sont installés dans une vie « normale ». Au gré de la journée, au gré des rencontres, tous s’interrogent sur le sens de leur vie, sur les choix qu’ils ont fait, sur les opportunités manquées… Plus la journée avance, plus on comprend combien il est difficile pour Anders de revenir dans un monde auquel il n’appartient plus. Anéanti par la solitude et par le manque de confiance en soi, trouvera t’il la force de renaitre ? Le réalisateur répond à cette question dans un final aussi simple que puissant qui vous collera à la peau après la séance.
L’expérience Oslo, 31 Août n’est pas sans rappeler l’errance de Last Days de Gus Van Sant. Cette catégorie de films n’a pas pour objectif de nous divertir mais ils semblent nous interroger frontalement sur les raisons de notre existence sans pour autant tomber dans la psychologie de comptoir : comment peut-on se remplir de sens ?
Oslo, 31 Août c’est un peu comme cette fille mystérieuse à la beauté froide et terriblement lucide, on hésite à s’en approcher de peur qu’elle nous révèle que, finalement, on a tout gâché.